Un poème, une playlist #2 : « coeur où l’on est chez soi »

Pablo Neruda, « Je me souviens de toi telle que tu étais en ce dernier automne… », Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée, Poème 6, trad. Claude Couffon et Christian Rinderknecht, « Poésies », Gallimard, 1998

Version originale : Veinte poemas de amor y una canción desesperada, Editorial Nascimento, 1924

Te recuerdo como eras en el último otoño. 
Eras la boina gris y el corazón en calma. 
En tus ojos peleaban las llamas del crepúsculo 
Y las hojas caían en el agua de tu alma. 


Apegada a mis brazos como una enredadera. 
las hojas recogían tu voz lenta y en calma. 
Hoguera de estupor en que mi sed ardía. 
Dulce jacinto azul torcido sobre mi alma. 


Siento viajar tus ojos y es distante el otoño: 
boina gris, voz de pájaro y corazón de casa 
hacia donde emigraban mis profundos anhelos 
y caían mis besos alegres como brasas. 


Cielo desde un navío. Campo desde los cerros. 
Tu recuerdo es de luz, de humo, de estanque en calma! 
Más allá de tus ojos ardían los crepúsculos. 
Hojas secas de otoño giraban en tu alma.

Je me souviens de toi telle que tu étais en ce dernier automne : 
un simple béret gris avec le coeur en paix. 
Dans tes yeux combattaient les feux du crépuscule. 
Et les feuilles tombaient sur les eaux de ton âme. 

Enroulée à mes bras comme un volubilis, 
les feuilles recueillaient ta voix lente et paisible. 
Un bûcher de stupeur où ma soif se consume. 
Douce jacinthe bleue qui se tord sur mon âme. 

Je sens tes yeux qui vont et l’automne est distant : 
béret gris, cris d’oiseau, coeur où l’on est chez soi 
et vers eux émigraient mes désirs si profonds 
et mes baisers tombaient joyeux comme des braises. 

Le ciel vu d’un bateau. Les champs vus des collines : 
lumière, étang de paix, fumée, ton souvenir. 
Au-delà de tes yeux brûlaient les crépuscules. 
Sur ton âme tournaient les feuilles de l’automne.

« Soft and tender, ça veut dire « doux et tendre » en français…

5 raisons de lire l’œuvre de Pablo Neruda :

  • Parce que la première fois que j’ai eu un poète préféré, c’était lui.
  • Parce que c’est touchant de découvrir le lyrisme amoureux à travers le discours d’un bonhomme qui n’a pas l’air comme ça…
  • Parce que l’espagnol c’est beau à lire et à écouter ; preuve en est, une lecture du poème par son auteur : http://web.uchile.cl/neruda/videos/6.mp3
  • Parce que la littérature est un acte politique et parce que la voix individuelle est d’autant plus forte qu’elle se fait l’écho des voix collectives (v. Canto general / Chant général).
  • Parce que les mots de l’exilé.e ont toujours cette force mélancolique qui fait vibrer mon petit coeur.

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